Pratiquer le minimalisme à Noël: compliqué mais pas impossible!
- Chloe
- 12 déc. 2017
- 10 min de lecture

Il y a quelques années, à Noël, mon cousin tout grognon nous dit : « j’aime pas Noël ! Je veux dire, j’aime être en famille, bien manger, qu’on se retrouve mais alors les cadeaux, qu’est-ce que ça me saoule ! Tu essaies toute l’année de mettre des sous de côté et en Décembre tu te ruines en puisant tout ce que tu avais tant bien que mal épargné. Tu te creuses la tête pendant des jours parce qu’au lieu de faire plaisir à quelqu’un, vraiment, et une fois de temps en temps, tu dois faire plaisir à tout le monde en même temps, sans le budget qui va avec. » J’étais plutôt d’accord mais j’étais aussi celle qui répondait «sois pas grincheux, c’est trop bien Noël, offrir les cadeaux, voir les gens heureux. Ca serait pas pareil sans ça. » Ah bon ? Vraiment ?
Est-ce que finalement ce sont les cadeaux qui nous rendent profondément heureux à Noël ? Ou plutôt l’art de passer du temps en famille et avec les gens qu’on aime, un bon verre à la main et des mois à rattraper si l’on ne se voit pas souvent ? Est-ce que ce n’est pas cette période durant laquelle on va plus facilement donner à un SDF dans la rue car ça nous paraît impensable, à nous, d’être seuls pendant les fêtes ? Qu’on se sent donc plus généreux mais dans le fait de donner de soi aux autres, pas de leur donner du matériel. Rire aux éclats durant le repas, tous s’entraider dans la cuisine, se chamailler...
Alors oui, rares sont les personnes qui n'aiment pas les cadeaux. Mais si on regarde bien, c’est censé être le climax de la journée, ce moment où l’on est si heureux de déchirer le papier. Sauf que voilà, souvent c’est également associé à de la gêne. Qui a le meilleur cadeau, est-ce que le nôtre est aussi coûteux et bien que celui qu’on nous offre, est-ce que c’est suffisant ou pas « trop »,et si je n'aime pas et que ça se voit ? On est content, on s’embrasse, on se demande où on va ranger telle babiole, à qui on va redonner celle-ci et quand est-ce que sera le meilleur moment pour revendre en ligne celle-là (qu’on soit honnêtes, les études montrent que des centaines de milliers de cadeaux sont revendus dès les fêtes passées.) Et puis on se remet à table. On oublie. On ne sait d’ailleurs pas par quoi commencer ni comment se souvenir de tout ce qu’on a eu quand on debrief le lendemain. Chouette…

On va éviter les discours moralisateurs sur la planète et l’environnement. Bien qu’ils soient carrément au cœur du problème à Noël. Parce que manger moins de viande, consommer mieux, économiser durant l’année entière (quand on peut), ne plus se ruer dans les magasins pas chers qui font travailler le tiers monde, tout ça c’est bien. Péter tous ses principes pour une fête de deux jours, ça l’est carrément moins ! Ramené au nombre de consommateurs qui achètent à Noël et au nombre de cadeaux qu’ils achètent, si tout le monde se dit « F*** c’est Noël », c’est un carnage. Et c’est d’ailleurs la réalité.

Alors, comment on fait dans la réalité pour contourner ça ? C’est vrai quoi, quand les beaux-parents adorent nous couvrir de cadeaux, souvent dans l’excès, parce qu’ils sont trop heureux de faire plaisir, quand les parents n’aiment pas donner de l’argent car c’est admettre que leurs grands bébés peuvent maintenant s’offrir ce qu’ils désirent et ce dont ils ont besoin. Comment aller ennuyer les gens à chercher pendant des heures un cadeau de Noël chez un commerçant, local, qui en plus pratique l’éthique et responsable ? Comment convaincre sa tante de ne pas acheter du foie gras quand elle ne sait pas comment il a été fait et de se calmer sur la viande qui finira par être jetée ? A vrai dire il faut déjà commencer par admettre que ce n’est pas possible et qu’on n’est pas superwoman/superman mais que les alternatives sont là.
Bon, moi mes parents ont très vite compris comment je fonctionne depuis quelque temps maintenant. Ils lisent mes articles, m’entendent leur rabâcher des trucs. Et puis, dans ma famille, le premier relou qui parlait d’environnement et qui n’aimait pas Noël, c’était mon père. Donc c’est easy ! Par contre avec mes beaux-parents, c’est beaucoup plus délicat. Ils n’ont pas vraiment suivi notre « transition » vers le minimalisme avec Thomas, et sa maman est si belle à voir à Noël, avec son cœur d’enfant (le même qu’elle a refilé à mon cher et tendre et que j’aime tant), à ne jurer que par Noël et à vouloir faire plaisir à tout le monde. Sauf que le hic, c’est que quinze tasses, un gros meuble déco, des cadres à gogo…. bah nous ça ne nous fait plus plaisir. Mais comme c’était le cas pour moi avant, difficile pour elle de s’y retrouver. Alors c’est un travail de fond délicat, qui se fait à deux. Elle envoie des idées de cadeaux « matériels » à Thomas qui lui répond de manière diplomate que notre appart’ est trop petit, qu’on remonte en Angleterre à cinq dans une voiture et qu’on n’en a pas besoin. BE-SOIN. Ce mot que l’on oublie complètement à Noël, jusqu’à son sens propre. « Bah, t’as pas besoin d’en avoir besoin tant que ça te fait plaisir »…
Alors comme on ne vit plus en France, on prône également le « on sera réunis, et ça c’est encore mieux. » On parle, beaucoup, du van et de notre futur mariage, car ce sont les deux choses qui nous tiennent le plus à cœur en ce moment et pour lesquelles on a besoin d’argent ou de « cadeaux ». Enfin, encore une fois, besoin est très relatif ici. Car on n’a pas besoin de se marier ni d’avoir un van.
Mais voilà, notre van nous coûte de l’argent en rénovation mais il nous en économise aussi énormément quand on part visiter (logement, restaurants…) Et c’est ainsi que l’on voit les choses maintenant. On peut passer pour des radins, on a simplement une façon de consommer différente. Et on économise. Pas suffisamment pour nous, beaucoup plus et beaucoup plus vite que la moyenne française. Et là, vous allez vous dire « ils travaillent tous les deux et ont des salaires corrects. » Vrai. Mais c’est aussi pour ça que quand je vois ce qu’on a la capacité d’économiser chaque mois en ayant un appartement qui nous coûte presque 1000 euros, et que je vois ceux qui gagnent encore plus que nous (et y'en a un paquet) et qui n’économisent pas un rond et viennent s’en plaindre ensuite, j’hallucine royalement. Et ça, c’est un choix de vie. Qu’on se le dise. Qu’on soit honnête. Je ne parle pas ici de ceux qui ont des enfants ni des gens qui vivent seul avec un salaire absolument pas correct. Mais les couples, jeunes, comme nous, à deux, qui n’économisent pas un sous à la fin du mois, ceux qui gagnent leur vie et sont encore chez leur parents ou ceux qui gagnent plus de 3000€ par mois à deux ou seul, et qui ne suivent pas. Sincèrement je ne comprends pas. Du moins je ne comprends plus. Car si c’est possible pour nous, pourquoi pas les autres ? Ou alors il faut admettre que l’on choisit de consommer plutôt qu’épargner. Mais il ne faut pas venir pleurer!

Bref, j’ai (sensiblement) largement digressé ici. Mais c’est pour relier tous ces discours, parfois, souvent, très incohérents et qui lient plaintes et consommation de masse. Les deux ne vont pas ensemble ! Ces discours où le mot « radin » tombe pour ceux qui épargnent et où le mot « chanceux » revient ensuite quand ces mêmes personnes partent en voyage (coucou le truc vécu et re re vécu) Pas très logique tout ça… Et bien Noël c’est pareil! Revoir sa façon de voir les choses et de penser, se recentrer sur l’essentiel. Dire, redire et re redire à ses parents, beaux-parents, proches que l’on ne veut pas de cadeau matériel, qu’on n’en a pas l’utilité et qu’ils finiront dans un tiroir (l’honnêteté est le meilleur moyen d’y arriver), leur parler de nos passe-temps, trucs qui nous font vraiment du bien et leur dire que dans ce cas, un petit manteau pour courir au chaud l’hiver pourrait faire plaisir, des panneaux solaires sur un van aussi, de l’argent pour payer le barbecue bonne franquette au mariage (d’ailleurs quand les préparatifs avanceront vraiment, je ferai certainement un post sur la galère MAIS la possibilité de préparer un mariage "à moindre coût", minimaliste et un peu écolo, et de le faire entendre autour de soi.)
On ne va pas se mentir, faire attention est le maître mot depuis quelques temps. Car on a bien tiré sur la corde et il faut la lâcher maintenant. A tel point que c’est aussi un peu devenu une mode, celle des « bobo écolo ». Et faire attention, c’est chiant! Ca, on est tous d’accord là-dessus. Et alors faire attention à Noël et qu'on vienne gâcher cette belle fête commerciale avec ces conneries, hors de question! Mais bon, mode ou pas mode, le problème environnemental il est bien là lui, et il n’attend pas après nous pour se calmer. Enfin si, justement. C’est sûr que c’est plus simple d’aller acheter pour six-cent balles de cadeaux de Noël fabriqués dans des conditions très très douteuses, et qui participent à bousiller la planète, quand les feux font rage mais à l’autre bout du monde. On n’y est pas là-bas, on s’en fout.
Mais quand on commence d’abord par s’informer un peu sur le problème, on apprend finalement pleins de choses intéressantes qui nous donnent envie d’en savoir encore plus. Et c’est beaucoup plus sympa comme ça qu’en lisant des commentaires culpabilisants, puérils et dénués de sens entre vegan et carnivores par exemple, entre minimalistes et serial shoppers. Du coup ça engendre une remise en question étape par étape, sans se forcer, jusqu’au jour où on va dans les magasins sans avoir envie d’acheter. Et que du coup, quand on a le temps et qu’on le gagne en n’allant pas perdre une après-midi au centre commercial, on peut chercher les trucs écolo, faits mains, localement, qui se font par des gens qui essaient de vivre de ça en aidant la planète et qui, eux, ont vraiment besoin de nos achats et de notre soutien. Et puis en vivant comme ça, on découvre que finalement on se sent mieux. On ne sait pas trop pourquoi ni comment mais on sait que c’est le cas. Surement parce qu’on a arrêté de courir après un bonheur éphémère et inexistant qu’on croyait être dans le « posséder toujours plus » et « en mettre plein la vue. »

C’est ainsi que Noël cette année a été assez « bâclé » pour nous en terme de cadeaux (on se sent un peu égoïstes mais on n’a juste pas le temps de se pencher là-dessus, et pas trop l’envie il faut l’avouer) et qu’il s’agira surtout de se retrouver en famille. On se dit qu'il faut bien un début et un peu de galère pour sensibiliser notre entourage là-dessus. Ma sœur et moi avons convenu de ne rien nous offrir. Son cadeau sera son voyage en 2018 pour venir nous voir et moi je lui ai promis d'aller avec elle au parc Harry Potter Studio et de lui offrir sa place. Un truc qu'on se payera en temps voulu et un souvenir à partager. On a également décidé de cuisiner et préparer un repas pour nos parents.
Evidemment, pas de cadeau dans notre couple non plus, pour la 3ème année consécutive (j'ai envie d'ajouter qu'un mariage, un van et être si bien entourés en est un de cadeau, valable à vie...) Et tenir bon a fonctionné, la plupart de nos cadeaux semblent être destinés à la rénovation du van.

Je finirai sur ça : cet été, un ami m’envoie un article sur le minimalisme. Une journaliste américaine qui déteste le principe, le critique, le réduit en morceaux et dit que ce n’est qu’une mode créée par des gens riches, pour se sentir mieux, remplir leur feed Instagram, être "in" et faire la leçon aux autres. Et que pour eux c'est facile, car l'argent ils l'ont. Ca m’a mise en colère de lire ça, mais en même temps j’ai bien dû avouer qu’elle avait en grande partie raison. Toutefois, en me posant la question de savoir si ce n’était QUE ça et si ce n’était pas une mode qui me faisait du bien maintenant mais ne m’en ferait pas plus tard, je me suis souvenue qu’à l’époque où j’ai reçu cet article (et c’était encore le cas il y a 2 mois), mon conjoint et moi vivions à l’autre bout du monde, lui en étant stagiaire et moi en bossant au gré des besoins comme rédactrice publicitaire, en freelance. En Malaisie, on était plutôt riches avec nos 800 euros par mois à nous deux mais pas de quoi épargner pour le retour. On a même plutôt dépensé d'ailleurs. On ne vit et ne voyage pas en Asie tous les ans.
Et avant ça, avant le grand départ de France, on a réussi a épargner de quoi tenir notre année voyage/expatriation entre l'Irlande et la Malaisie, couvrir nos billets d'avion, nos installations etc... en étant étudiants d'abord puis l'un étudiant et l'autre au SMIC.
Alors non, le minimalisme n’est pas réservé aux riches, nous ne l’étions pas et nous étions bien obligés de ne pas dépenser justement. J’ai donc appris comment mieux consommer, épargner, et découvert que mon bonheur profond ne se trouve plus dans une paire de chaussures. Et oui, se payer aujourd'hui un resto' quand ça nous chante, ne pas regarder si on prend un petit ou grand pop corn au cinéma, pouvoir acheter plus de bonne bouffe et pas que des pâtes est un réel bonheur et surtout une chance. On le sait, on ne crache pas dessus mais au moins on a connu nos limites et on s’attache à garder ces valeurs.
Certains n'aiment pas Noël, pour ma part je me languis de cette période parce qu'elle me permet de retrouver ma famille, et ça, quand on vit à 1000km, ça n'a pas de prix. J'aime entendre les rires des enfants dans la salle de cinéma quand je vais voir le dessin animé de Noël, j'aime voir les gens plus heureux que d'habitude, mon cœur se brise encore plus de penser aux SDF et personnes seules, et j'aime entendre les éclats de rire et verres qui trinquent ce jour-là. Mes yeux brillent sur les marchés de Noël et j'adore regarder les décorations chez les autres. Mieux et moins offrir ne m'enlève pas cette magie. Au contraire, ça l'accentue.

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